• Enquête publique sur le projet de parc éolien en mer des îles d’Yeu et Noirmoutier (2)

    Observations relatives à l’enquête publique sur le raccordement électrique
    du parc éolien en mer des îles d’Yeu et Noirmoutier

    oOo

    Les observations qui suivent portent sur le dossier du raccordement électrique présenté par RTE, se décomposant en plusieurs volets :

    ·     - création d’une liaison sous-marine et souterraine à deux circuits  225 000 volts dite « Vent des îles -  Gué au Roux » ;

    ·     - création du poste électrique intermédiaire du Gué au Roux (commune de Soullans) ;

    ·    - création des liaisons souterraines de raccordement à 225 000 volts du poste électrique intermédiaire de compensation du Gué au Roux au poste électrique de Soullans en vue du raccordement au réseau existant de transport de l’électricité.

    Elles viennent compléter et préciser les premières observations de la déposition commune communiquée le 18 avril 2018 à la commission d’enquête.

    Une autre série d’observations sera d’autre part émise sur le projet conjoint de la société EMYN, dans le cadre du second volet de l’enquête publique (parc éolien en mer et bases de maintenance).

    Enquête publique sur le projet de parc éolien en mer des îles d’Yeu et Noirmoutier (2)

    Le projet présenté par RTE nous est connu dans la mesure où il est discuté depuis le débat public de 2015 et les différentes réunions de l’instance de concertation pilotée par l’Etat. Il consiste à organiser le transport de l’électricité produite par le parc éolien en mer depuis sa station électrique marine vers le continent, en traversant une série de milieux sensibles jusqu’à un poste électrique terrestre à créer, à partir duquel sera assurée l’injection de l’électricité sur le réseau de distribution.

    La sensibilité des milieux est attestée par le fait qu’une très forte proportion de l’aire d’étude, excepté la frange Sud-Est, est concernée par diverses protections règlementaires superposées :

           Natura 2000 (ZSC, ZPS), impliquant le respect des Directives européennes Habitats et Espèces ;

           espaces remarquables au titre de la Loi Littoral ;

           espaces boisés classés ;

           ZNIEFF ;

           espaces sensibles définis par le Département.

    L’exemplarité dans la démarche et dans la concrétisation doit s’imposer.

    Nos « cahiers d’acteurs » produit dans le cadre du débat public insistaient sur l’attention que nous portions notamment aux points suivants : le choix du site d’atterrage, l’implantation à terre du poste intermédiaire dit de compensation, et les tracés des différents câbles électriques.

    Nous écrivions ainsi : « Il importe de ne pas fragiliser le trait de côte et l’écosystème plage-dune, déjà exposés au risque d’érosion côtière et à la hausse du niveau de la mer. Il importe également de ne pas menacer l’intégrité de la forêt dunaire, dont VNE souligne la triple fonction : écologique, sociale, et de protection (fixation des dunes, protection contre le risque de submersion marine). Il importe enfin de préserver l’intégrité des zones humides caractéristiques du Marais Breton-Vendéen. »

    Nous maintenons bien sûr l’ensemble de ces remarques, et considérons qu’elles ont été prises en compte de manière satisfaisante dans les choix du fuseau de moindre impact d’une part, et du site d’implantation du poste de compensation d’autre part, au terme d’une analyse largement partagée avec l’ensemble des parties prenantes, ce dont l’étude d’impact rend bien compte.

    Pour autant, nous observons que le tracé de détail reste à établir, qui ne sera donc connu qu’ultérieurement.

    Il implique plusieurs types d’ouvrages : liaison sous-marine, jonction d’atterrage, liaison souterraine avec chambres de jonction, poste intermédiaire, dont certains éléments de réalisation sont encore imprécis.

    Des variantes restent en effet ouvertes, pour lesquelles les choix finaux dépendront des résultats d’études non encore finalisées, d’appels d’offres à venir, de contraintes calendaires et éventuellement météorologiques, etc., le planning des travaux couvrant jusqu’à trois années pleines.

    Nous réaffirmons donc notre demande de continuer à être pleinement associés par le maître d’ouvrage à la suite de sa démarche et à la détermination de ses choix finaux : détermination du tracé final dans ses détails, choix des options techniques à retenir et modalités de conduite de chaque chantier.

    À ce stade, nous pouvons d’ores et déjà relever plusieurs sujets de préoccupation :

    Liaison sous-marine :

    Les options préférentielles avancées pour la pose et la protection des câbles sont l’ensouillage ou l’enrochement. Le scénario mixte, qui mêle les deux techniques, conduit à altérer ou détruire une surface plus importante que l’ensouillage seul, avec de plus des effets permanents. Le mode d’appréciation des impacts qui consiste à ramener la surface sous-marine affectée à celle de la totalité de l’emprise, surfaces terrestres comprises, revient à minimiser l’importance du sujet. Or, le volume des enrochements projetés et leur emprise supposée s’avèrent tout à fait conséquents. Et c’est bien sûr sur ces deux paramètres qu’il convient d’agir pour minimiser au mieux les impacts sur les fonds sous-marins, plutôt que sur des ratios surfaciques hors de propos.

    Les travaux de préparation des sols ne sont pas décrits à ce stade d’une manière qui permette d’en mesurer l’ampleur réelle ; or, ceux-ci sont potentiellement significatifs dès lors qu’il s’agit d’aplanir les fonds, d’en combler les dépressions ou à l’inverse d’y creuser des fosses.

    Sur ces deux sujets de la protection des câbles et de la préparation des sols sous-marins, RTE indique avoir choisi les approches les plus conservatives et se déclare prêt à étudier les meilleures options possibles. Nous demandons un engagement ferme à travailler dans ce sens ainsi qu’à partager avec l’ensemble des parties prenantes l’information, la réflexion et la décision finale.

    Par ailleurs, le dossier n’est pas exempt d’incohérences, quand RTE affirme prévoir des options de protection des câbles sous-marins privilégiant des matériaux inertes, mais que par ailleurs il mentionne la possibilité d’utiliser des polymères (en contradiction avec le contenu de la mesure MR.M5).

    Nous attendons une confirmation définitive sur ce point, écartant tout recours à des matériaux susceptibles de présenter, à plus ou moins long terme et même à faible échelle, un risque de pollution du milieu marin.

    L’hydrodynamisme et sa composante hydro-sédimentaire restent très mal connus dès lors que l’on s’éloigne de la côte et que les fonds marins concernés s’approfondissent. Conclure à un impact faible en ce domaine ne paraît pas parfaitement étayé par un état initial manquant en l’occurrence de données mesurées. Un « état zéro » mériterait d’être effectué, qui seul permettrait un suivi comparatif des effets sur le milieu, d’abord en phase chantier puis tout au long de l’exploitation.

    Atterrage :

    Si nous approuvons le choix des  sites d’atterrage  et d’implantation des chambres de jonction, la plus grande attention doit être apportée aux conditions dans lesquelles cette partie du chantier sera conduite.

    Nous relevons avec inquiétude dans le mémoire descriptif (pièce P2.1 du dossier DUP, p. 35, ; 38) la perspective du stockage sur le haut de plage de 4 000 m3 de matériaux sableux et la création d’une aire de stationnement des engins de chantier en milieu dunaire, alors que ces aspects sont absents de l’étude d’impact. Nous demandons à ce que RTE apporte un éclairage sur les alternatives envisagées, sur les impacts de ce stockage si ce choix d’emplacement devait être maintenu et sur les mesures envisagées pour les réduire.

    Nous souhaitons une réponse à la question de l’alternative prévue pour le stationnement des véhicules particuliers des visiteurs de la côte et le cheminement de ces derniers pendant la durée du chantier qui rendra le parking actuel inutilisable.

    Ces différents points auraient mérité une explicitation dans l’étude d’impact, dont ils sont en réalité absents. Nous demandons une mise en cohérence avec les engagements notamment pris d’assurer la protection des milieux sableux et dunaires contre toute dégradation liée au chantier.

    Liaison terrestre souterraine :

    Nous indiquions dans notre « cahier d’acteurs » de 2015 soutenir « le recours à la technique du forage dirigé autant que nécessaire pour ne pas impacter l’estran ni les éléments patrimoniaux que sont la dune et la forêt dunaire, le marais. » Nous maintenons cette position, tout en intégrant que la complexité des milieux, leur topographie, notamment en zone de marais, peut conduire à privilégier d’autres méthodes, décrites dans l’étude d’impact, pour la traversée de routes ou de certains étiers.

    La nécessité d’implanter des chambres de jonction tout au long du tracé conduit localement à certains impacts spécifiques qui paraissent correctement traités.

    La phase travaux nécessite la plus grande attention, sachant que celle-ci s’étendra sur une longue période, avec des phases d’interruption, et des moments où les opérateurs devront chercher à avancer rapidement, en fonction notamment de considération liées aux phénomènes météorologiques et leurs conséquences en termes d’accessibilité des terrains.

    Nous avons déjà eu l’occasion d’indiquer au maître d’ouvrage que les zones et périodes de nidification peuvent varier de façon conséquente d’une année sur l’autre, en fonction des conditions auxquelles le milieu est lui-même soumis (inondation vs. sécheresse), celles-ci déterminant à leur tour les conditions dans lesquelles son  exploitation s’organise du point de vue de l’agriculture, conditions qui in fine influent sur la répartition des espèces dans toute leur variété. De plus, nous faisons observer que les années hydrologiques 2015-2016 et 2016-2017 ont été parmi les plus sèches que l’on connaisse, avec une durée particulièrement marquée, et qu’elles ne peuvent être considérées comme des années de référence..

    Un calendrier prévoyant des chantiers démarrant à la mi-juin est trop précoce. Il est par conséquent nécessaire d’envisager des modalités permettant de définir chaque année que durera le chantier, des zones prioritaires dans lesquelles les travaux devront être retardés à la mi-juillet.

    La séquence éviter-réduire-compenser :

    À défaut d’être explicitées, les mesures d’évitement liées à l’atterrage (ME.M4, ME.M5), rapportées à nos observations précédentes, donnent au mieux l’impression d’une incohérence qui aurait échappé au rédacteur ou à la relecture.

    La mesure de réduction MR.M7 concernant les activités de tourisme et de loisir mérite également d’être précisée pour ce qui concerne les impacts dus à la fermeture du parking pendant les travaux et à la modification des accès à la plage.

    Certaines mesures de réduction proposées sont discutées et les experts que nous avons pu entendre sur le sujet (tout comme RTE), semblent pour la majorité dubitatifs face à la mesure MR.M5. Ces mesures mériteront une évaluation plus précise de leur intérêt et de leurs potentialités en termes de chances de résultats :

    -          MR.M5 : collecte de graines locales et semis après travaux.

    -          MR.S9 : replantation de rhizomes.

    La mesure MR.S11 propose des interventions préalables avant travaux pour rendre les secteurs défavorables aux espèces de faune et de flore susceptibles d’être impactées par les travaux (« travaux préparatoires permettant de maintenir temporairement sur les zones d’emprise du tracé de détail des  conditions structurelles défavorables pour la faune afin d’éviter le risque de trouver sur celles-ci des individus d’espèce non volants ou non émancipées au moment de la mise en œuvre du chantier »). De ce fait, elle s’analyse plutôt comme une mesure dérogatoire à la protection des espèces et de leurs habitats que comme une mesure de réduction. Elle devrait donc être intégrée à la demande de dérogation du maître d’ouvrage, qui doit être instruite au titre des articles L.411-1 et suivants du Code de l’environnement.

    La mesure de compensation MC.S2 (compensation de la destruction de zones humides) doit bien sûr répondre aux exigences de la réglementation. Elle ne représente toutefois à ce stade qu’une simple pétition de principe, les conditions de sa mise en œuvre n’étant pas arrêtées. Nous réaffirmons à nouveau notre demande de continuer à être pleinement associés par le maître d’ouvrage à la suite de sa démarche et à la détermination de ses choix finaux quant à cette mesure.

    Mesures relatives aux suivis environnementaux :

    L’importance de ce thème doit être soulignée, avec certes le respect d’un principe de proportionnalité, mais avec la nécessité d’un engagement sur une durée suffisante pour obtenir des conclusions significatives. L’exigence d’exemplarité doit également s’exprimer ici.

    De ce point de vue, la mesure MS.M1 (évaluation de l’effet récif et de la recolonisation des substrats rocheux) paraît mériter de s’exercer sur une durée plus longue que les seules campagnes prévues à 6 mois, puis à T+1 et àT+2.

    Enfin, s’agissant des suivis environnementaux, RTE ne paraît pas s’être positionné quant à la proposition de la société EMYN de constituer un groupement d’intérêt scientifique (GIS « éolien en mer ») dédié au partage des connaissances des impacts environnementaux d’un parc éolien en mer et au suivi de la mise en place des mesures. Nous demandons à RTE de faire connaître la part qu’il compte prendre dans ce futur GIS dont les objectifs le concernent directement au moins pour la partie maritime et littorale dont il est le maître d’ouvrage.  Nous soulignons, comme le fait l’AFB dans son avis, la nécessité de suivre les effets des champs électro-magnétiques sur plusieurs cortèges d’espèces de la faune marine.

     

    Conclusion

    Après avoir étudié les dossiers très foisonnants qui donnent lieu à cette enquête publique, nous constatons, sans surprise, que beaucoup de points restent encore à préciser. Cela tient pour partie à des effets de calendrier, mais aussi à la procédure règlementaire qui impose la mise à l’enquête d’un tracé général au sein duquel ne sera déterminé qu’ultérieurement le tracé de détail ; or, c’est seulement à ce moment-là que pourront être arrêtées les véritables options techniques et la plupart des mesures environnementales.

    Ayant suivi le cheminement de ce dossier depuis son début, nous considérons que le fuseau proposé à l’enquête correspond bien à la notion du « moindre impact » telle qu’elle a pu être appréciée au cours de la concertation préalable.

    Les suites du projet du raccordement sont évidemment dépendantes de la manière dont va évoluer le projet de parc éolien en mer. 

    Cela étant, et en l’état actuel du programme, ce volet est par lui-même générateur d’impacts, qui doivent être pris en considération, et qui ne doivent pas être minimisés dans leur analyse. Il convient au contraire de s’affronter à leur réalité tout en concédant qu’elle peut nous échapper faute de connaissances et de recul suffisants. De ce seul fait, l’évitement doit être en tout temps et en tout lieu l’option première. Si robuste qu’elle puisse donner l’impression d’être, une étude d’impact ne rend pas nécessairement compte des enjeux ni de la réalité de ce qui suivra.

    C’est pourquoi nous attacherons une très grande importance à la nouvelle phase de concertation à ouvrir en aval de l’enquête publique, ainsi qu’aux suivis environnementaux qui devront permettre de garantir qu’un niveau minimal d’impacts est bien atteint, ou d’introduire des mesures correctives si la nécessité s’en faisait sentir.

    Les différentes questions que soulève la présente déposition reflètent notre niveau de préoccupation, lequel est à la hauteur de l’importance des enjeux environnementaux des milieux impactés par les opérations de raccordement électrique du parc.

     

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